La pluie glacée et le nuage de poussière soulevé donnaient l’impression qu’un feu venait d’être circoncis dans la cuisine. Des faisceaux de lumières s’agitèrent et s’éteignirent aussitôt. Couvert de débris de verre, l’homme se releva lentement en rejetant au loin tout ce qu’il avait sur le dos. Un toussotement le rassura, sa femme n’avait rien. Les yeux mouillés, elle serrait, tremblante, son enfant. Un rire nerveux saccada sa respiration quand elle le vit respirer paisiblement, et le deuxième cœur de l’homme se remit à battre. Le pouvoir, il l’avait aussi, même s’il était légèrement différent de celui de son fils. Un peu comme l’eau salée et l’eau douce : l’une corrosive et abondante, l’autre douce, salvatrice, rare, mais ô combien puissante. Le corps fumant, les traits de son visage s’accentuèrent brusquement quand il fit face aux mystérieux assaillants.
Ils étaient quatre; tenues cuirassées aussi sombres que la nuit; casques cachant entièrement leurs visages; et fusils d’assaut à la dégaine futuriste munis de faisceaux lasers, dévoilant au passage le nuage de poussière.
Des miliciens !
Ce que redoutait le plus le couple. Une telle extrémité dans l’intervention ne pouvait signifier qu’une chose.
Ils savaient !
Au-dessus des assaillants, des cordes aussi noires que leurs tenues, luisaient comme des lianes dans une jungle amazonienne des temps anciens sous une mousson dévastatrice. Difficile de distinguer leurs silhouettes suintantes. Seuls les ronds rouges rubis de leurs lunettes de vision nocturne trahissaient de nouveau leurs présences, s’étalant comme un coucher de soleil sur une vitre mouillée.
L’un d’eux s’avança d’un pas déterminé dans un crissement de verre brisé, et annonça d’une voix beaucoup trop grave pour être la sienne :
- L’enfant, où est…
Le milicien n’avait pas encore fini sa phrase qu’un éclair vert illumina soudainement toute la serre. S’en suivit un grondement terrible, qui fit trembler toute la structure en verre, devenu le théâtre d’un spectacle aussi incroyable qu’effrayant.